Tout près de nous, là -haut, couvrant nos côtes, tout près de nous car vivante comme nous le sommes, la forêt. Résultat d’une longue oeuvre de reconstitution nécessaire et réussie après l’hécatombe de 1916, elle n’a rien de naturel. Lequel de nous n’a-t-il pas été frappé par les images de la guerre et notamment celles de la bataille de Verdun, où nous voyons de pauvres soldats à l’assaut d’un paysage lunaire barré de ci de là par quelque moignon de tronc d’arbre dressant vers le ciel ses lambeaux de bois éclaté, vestige apocalyptique d’une forêt tranquille ou d’un verger soigné?
En 1992, la forêt a refait sa silhouette: dégagement des bornes, abattage d’arbres, travaux de bulldozer. L’ONF avait décidé de remettre en état le périmètre de la forêt domaniale , les limites usuelles 70 ans après sa constitution, ne correspondant plus toujours aux plans cadastraux. Ou bien la pousse spontanée d’essences forestières avait fait avancer la forêt, ou bien ailleurs quelques coups de charrue malheureux avaient empiété sur la propriété de l’Etat.
La première étape de ce travail a consisté en un relevé du bornage encore existant par les agents de l’ONF, puis à un repérage par jalons des bornes manquantes. Il a été fait appel à un géomètre pour procéder à leur remplacement. Suite à ce travail, la plupart des propriétaires fonciers de Bras dont les parcelles jouxtaient la forêt ont été conviés à la maison forestière. Durant une petite promenade, chacun a été invité à constater l’emplacement des limites et à signer le procès verbal de bornage.
L’aménagement des périmètres a suivi. Il consistait à la mise à blanc d’une bande de 5 mètres de large,qui après terrassement pu servir de voie de service. Pour matérialiser définitivement les limites, il fut ensuite procédé au creusement d’un fossé à un mètre en retrait sur le terrain domanial.
Après de tels travaux, gare à celui qui se risquerait encore à grignoter le terrain de l’Etat. Message reçu 5 sur 5 par les agriculteurs de la commune qui par ailleurs se réjouissaient de voir disparaitre le cordon d’épines envahissantes qui jusqu’ici matérialisait la limite forêt-champs.
La forêt domaniale de Verdun couvre 9600 hectares au nord de la ville de Verdun sur les terrains dévastés au cours de la guerre de 1914/18. Dès 1927 des plantations ont été réalisées, dont 50% en résineux. En 1934, une forêt était reconstituée sur le sol des 7 villages entièrement détruits. Jusqu’en 1974, la forêt fut ainsi entretenue avec des périodes plus ou moins fastes. En 1974, un plan d’aménagement téméraire proposa la reconversion de toute cette forêt, variée mais pauvre, en une hêtraie. Commencèrent alors sur un sol encore fragile les plantations de feuillus, essentiellement du hêtre mais aussi des essences précieuses ou fruitières.
A raison d’une centaine d’hectares par an, il faudra un siècle pour régénérer la totalité de la surface. Ainsi grâce aux efforts de nombreux forestiers, depuis 1974 émerge d’un sol meurtri à jamais la plus grande forêt de feuillus régénérée artificiellement par plantation sans abri avec enlèvement progressif de la couverture, méthode énergique et opération d’envergure unique au monde! Si dans ce massif la sylviculture est prioritaire, d’autres objectifs sont aussi pris en considération: l’accueil du public, la chasse, les loisirs.